Le 7 février 2009 reste une date indélébile dans l’histoire de Madagascar. Ce jour-là, des manifestants en colère se dirigèrent vers le Palais présidentiel d’Ambohitsorohitra, à Antananarivo, exigeant la démission du président de l’époque, Marc Ravalomanana. La réponse fut brutale : des tirs nourris, des cris, des corps tombant à terre, et une place souillée de sang. Seize ans plus tard, alors que Madagascar fait face à de nouveaux défis, ce massacre continue de soulever des interrogations, des rancœurs et des luttes politiques.
Le 7 février 2009 : un tournant sanglant dans la crise malgache
Le contexte de l’époque était explosif. Depuis plusieurs mois, un bras de fer opposait Marc Ravalomanana, alors président, à Andry Rajoelina, maire de la capitale, qui s’était imposé comme figure de l’opposition. La grogne populaire grandissait face aux décisions du pouvoir, perçues comme autoritaires et favorisant les élites économiques.
Le 7 février, une foule massive, convaincue de se battre pour la démocratie et la justice, marcha vers Ambohitsorohitra. L’objectif ? Occuper le Palais présidentiel et symboliser ainsi la fin du régime Ravalomanana. Mais l’issue fut dramatique.
Les tirs éclatèrent soudainement. Officiellement, au moins 31 personnes trouvèrent la mort et des dizaines d’autres furent gravement blessées. Les versions divergent encore aujourd’hui : la garde présidentielle a-t-elle agi en légitime défense ? Les tirs venaient-ils réellement du palais ou d’autres éléments infiltrés dans la foule ? Une enquête approfondie n’a jamais été menée, laissant place à une mémoire troublée, manipulée selon les récits politiques.
Que voulaient les manifestants ce jour-là ?
Les protestataires du 7 février 2009 revendiquaient avant tout un changement de régime. Beaucoup dénonçaient une concentration excessive du pouvoir et un gouvernement qui privilégiait les intérêts d’une minorité économique.
Les revendications populaires allaient au-delà d’une simple opposition politique. Elles incarnaient une soif de justice, d’égalité et de meilleures conditions de vie pour les Malgaches. Malheureusement, cette aspiration fut noyée dans la violence et instrumentalisée dans une transition politique qui ne répondit pas forcément aux attentes du peuple.
Quelques semaines après le massacre, le 17 mars 2009, Marc Ravalomanana fut contraint de quitter le pouvoir sous la pression de l’armée et d’Andry Rajoelina, qui s’installa à la tête d’un gouvernement de transition. Mais la situation du pays ne s’améliora pas pour autant. Madagascar entrait alors dans une décennie d’instabilité politique et économique.
Madagascar aujourd’hui : 16 ans après, où en est le pays ?
Seize ans après cet événement tragique, où en est Madagascar ?
Une démocratie encore fragile
Madagascar a connu plusieurs élections depuis 2009, avec des alternances de pouvoir, mais la stabilité reste fragile. Le pays continue d’être marqué par des contestations électorales, des accusations de fraudes, et une faible confiance des citoyens envers leurs dirigeants.
Le souvenir du 7 février alimente encore les discours politiques, chacun cherchant à en tirer profit pour justifier son propre agenda. Les victimes, elles, n’ont jamais eu droit à une justice réelle.
Une économie en souffrance
Sur le plan économique, Madagascar peine à se relever. En 2025, plus de 80 % de la population vit toujours sous le seuil de pauvreté, et le pays est classé parmi les plus pauvres du monde. La corruption gangrène l’administration, rendant toute réforme difficile.
Certes, certaines infrastructures ont été développées, notamment grâce à des investissements étrangers, mais ces avancées profitent rarement aux classes populaires. L’écart entre riches et pauvres s’est creusé davantage.
Une jeunesse en quête de repères
La génération qui avait 15 ou 20 ans en 2009 est aujourd’hui adulte. Beaucoup de jeunes n’ont connu que crises politiques, instabilité et précarité économique. Ils sont désillusionnés face aux promesses non tenues des dirigeants successifs.
Mais cette même jeunesse se mobilise, notamment sur les réseaux sociaux, pour dénoncer l’injustice et exiger des comptes sur les événements passés. Certains mouvements citoyens revendiquent aujourd’hui une gouvernance plus transparente et une réforme profonde des institutions.
Quel héritage pour le 7 février 2009 ?
Le massacre du 7 février 2009 restera une plaie ouverte tant qu’aucune vérité officielle ne sera établie et que justice ne sera rendue aux victimes.
En 2025, l’histoire du pays continue de se répéter : des élites qui se disputent le pouvoir, un peuple qui peine à voir le changement promis, et une mémoire collective marquée par des traumatismes non résolus.
Le combat des manifestants de 2009 n’a pas été vain, car il a montré que le peuple malgache refuse l’oppression. Mais seize ans plus tard, la question reste entière : quand Madagascar trouvera-t-il enfin la paix et la prospérité qu’il mérite ?
Ce 7 février 2025, nous avons le devoir de nous souvenir. Non pas pour diviser, mais pour apprendre. Car un pays qui oublie son passé est condamné à le revivre.